Costas Simitis, ancien Premier ministre de la Grèce, est décédé le 5 janvier 2025 à l'âge de 88 ans. Sa disparition marque la fin d’une ère politique qui a laissé une empreinte significative sur la Grèce contemporaine. Les causes de son décès, bien que liées à son âge avancé, n’ont pas encore été confirmées publiquement.
Costas Simitis est né le 23 juin 1936 à Athènes dans une famille issue de la classe moyenne. Dès son jeune âge, il s'est distingué par ses aptitudes académiques exceptionnelles et sa curiosité intellectuelle. Il a brillamment suivi des études de droit et d’économie à l’Université nationale et capodistrienne d’Athènes, où il s'est démarqué parmi ses pairs. Il a ensuite élargi ses compétences à l’étranger, étudiant à la London School of Economics et à l’Université de Marbourg en Allemagne. Ces expériences à l’étranger lui ont non seulement permis d’acquérir une expertise approfondie en sciences sociales et économiques, mais également de cultiver une vision mondiale et un engagement indéfectible envers les valeurs sociales-démocrates.
Durant la période de la dictature des colonels (1967-1974), Simitis s’est exilé en Allemagne, où il a joué un rôle central dans l'organisation de la résistance intellectuelle et politique contre le régime militaire grec. Il a été l'un des cofondateurs de la revue "Anti", un forum clé pour les opposants au régime, qui publiait des analyses critiques sur la situation politique en Grèce et sensibilisait la communauté internationale à la lutte pour la démocratie. En outre, il a participé activement à des réseaux clandestins visant à soutenir les dissidents en Grèce. Ce combat courageux pour la démocratie, souvent mené au péril de sa sécurité personnelle, a défini une grande partie de son identité politique et l'a propulsé sur le devant de la scène nationale après la chute de la dictature.
En 1974, Simitis a été l'un des membres fondateurs du Mouvement socialiste panhellénique (PASOK), dirigé par Andreas Papandreou. Son influence au sein du parti s’est rapidement accrue, et il a occupé plusieurs postes ministériels stratégiques. Ministre de l’économie et des finances au début des années 1980, il a supervisé des réformes économiques majeures visant à stimuler la croissance et à moderniser les infrastructures. Plus tard, en tant que ministre de l’Industrie, il a joué un rôle déterminant dans la restructuration des entreprises publiques et dans la promotion de l’investissement étranger. Ces initiatives ont jeté les bases de la compétitivité économique de la Grèce. Parallèlement, il a joué un rôle essentiel dans le développement de l’éducation et de la recherche. Il a soutenu des réformes visant à moderniser le système éducatif en renforçant les programmes scolaires et en promouvant l’égalité d’accès à l’éducation pour tous. En tant que défenseur de l’innovation, il a également encouragé la création d’instituts de recherche et l’établissement de partenariats entre les universités et les entreprises, contribuant ainsi à placer la Grèce sur la carte mondiale de la recherche scientifique.
En 1996, après la démission d'Andreas Papandreou pour des raisons de santé, Costas Simitis a été élu Premier ministre par le Parlement grec et a pris la tête du PASOK. Durant son mandat de 1996 à 2004, il a été le principal artisan de la modernisation de la Grèce, avec un accent sur la réforme économique, l’infrastructure nationale et l’intégration européenne. Il a mis en place des politiques ambitieuses pour renforcer les secteurs clés de l'économie, stimuler les exportations et attirer les investissements étrangers. Sous son gouvernement, des projets majeurs d’infrastructure, comme la modernisation du réseau autoroutier et la construction d’infrastructures liées aux Jeux olympiques d’Athènes de 2004, ont été initiés. Son mandat est marqué par l'adhésion de la Grèce à la zone euro en 2001, un accomplissement qu’il considérait comme l’un de ses plus grands succès et qui a consolidé la place de la Grèce au sein de l'Union européenne. Parmi ses déclarations fortes, il affirma en 1999 : "La Grèce ne sera pas seulement en Europe, elle sera au cœur de l'Europe," réaffirmant son engagement envers l'intégration européenne. Lors de la crise des Îles de l'Egée en 1996, il déclara : "La paix régionale repose sur la diplomatie, non sur l'escalade," marquant sa vision stratégique en matière de politique étrangère. Enfin, à propos des Jeux olympiques de 2004, il annonça : "Ce n'est pas seulement une compétition, c'est une renaissance pour la Grèce," illustrant son ambition de repositionner le pays sur la scène internationale.
Cependant, sa carrière politique n'a pas été exempte de controverses. Son gouvernement a été critiqué pour sa gestion des affaires économiques, notamment en ce qui concerne la présentation des données budgétaires à l'Union européenne, certaines d'entre elles étant accusées d'être manipulées pour permettre l'adhésion de la Grèce à la zone euro. Ces présentations ont été remises en question lorsque la véritable situation budgétaire de la Grèce a été révélée dans les années suivantes, contribuant indirectement à la crise financière de 2009. De plus, il a été accusé de ne pas avoir suffisamment traité la corruption et les problèmes structurels de l'économie grecque, notamment le clientélisme au sein des institutions publiques. En dépit de ces polémiques, Simitis reste largement reconnu pour avoir joué un rôle central dans la transformation de la Grèce en une économie moderne et intégrée au projet européen.
Sur le plan personnel, Costas Simitis était connu pour sa discrétion et sa vie privée à l'abri des projecteurs. Marié à Daphne Arkadiou, une intellectuelle respectée et militante sociale, le couple n’a pas eu d’enfants. Daphne, formée en lettres classiques et active dans les cercles académiques et artistiques, a joué un rôle important en soutenant les initiatives culturelles et en promouvant des projets visant à préserver le patrimoine grec. Ensemble, ils étaient très engagés dans des causes sociales, soutenant notamment l'éducation pour les jeunes défavorisés et le développement de programmes culturels visant à renforcer l'identité nationale.
Après avoir quitté le pouvoir en 2004, Simitis s’est retiré de la politique active mais est resté une figure influente. Il a publié plusieurs ouvrages, parmi lesquels "La Grèce dans l'Union européenne : Une trajectoire" (2006), "Modernisation et réformes : Les défis de la gouvernance" (2009), et "Les enjeux de l'économie mondiale et européenne" (2015). Ces publications illustrent son analyse profonde sur les questions d'intégration européenne, de gouvernance économique et de modernisation politique. Jusqu’à ses derniers jours, il était considéré comme l'un des penseurs politiques les plus respectés de la Grèce.
Le 5 janvier 2025, Costas Simitis s’est éteint à l’âge de 88 ans, des suites de complications liées à son âge avancé. Cette perte suscite une vague d’émotions rappelant son rôle essentiel dans la modernisation et l’intégration de la Grèce au projet européen. L'une de ses déclarations les plus caractéristiques de ce qu'il était restera celle-ci : "L’avenir appartient à ceux qui osent réformer et avancer, même face aux tempêtes."