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ANNIVERSAIRE

Pierre Messmer, 104 ans, un homme d'État au service de la France

Aujourd'hui, 20 mars 2025, marque le 104ème anniversaire de la naissance de Pierre Messmer, homme d'État français qui a joué un rôle majeur dans la politique et l'administration de la France au XXe siècle.

Pierre Messmer est né le 20 mars 1921 à Vincennes, en France, dans une famille bourgeoise aux fortes traditions républicaines. Élève brillant, il obtient son baccalauréat avec mention avant d'intégrer l'École nationale de la France d'outre-mer, où il se prépare à une carrière dans l'administration coloniale. Cependant, le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale bouleverse son destin. Refusant l'armistice de 1940, il rejoint les Forces françaises libres du général de Gaulle et s'engage comme officier dans la Légion étrangère.

Il participe à de nombreuses campagnes militaires, notamment en Afrique du Nord, où il prend part aux combats pour la libération de la Libye et de la Tunisie, puis au Levant, où il contribue à la consolidation de la présence française face aux forces de Vichy. Par la suite, il rejoint l'Italie en 1943, où il s'illustre lors des batailles du Monte Cassino et du Garigliano, deux engagements cruciaux pour la progression des Alliés vers Rome. En août 1944, il est impliqué dans le débarquement de Provence, au sein de la 1ère Armée française du général de Lattre de Tassigny. Son courage au combat, son sens du commandement et son engagement indéfectible lui valent plusieurs décorations prestigieuses, dont la croix de la Libération, la Légion d'honneur et la médaille militaire. Cette expérience militaire forge en lui une discipline rigoureuse et un attachement indéfectible aux valeurs de la France libre, renforçant son engagement futur dans le service de l'État et de la nation.

Après la guerre, Pierre Messmer reprend son engagement dans l'administration et devient un acteur incontournable de la politique coloniale française. Il occupe plusieurs postes de gouverneur, notamment en Mauritanie et en Côte d'Ivoire, où il joue un rôle clé dans la gestion des relations entre la métropole et les élites locales émergentes. Son approche allie fermeté et pragmatisme, cherchant à maintenir l'influence française tout en préparant les territoires à une autonomie croissante.

En 1952, il est nommé gouverneur général de l'Afrique-Équatoriale française, puis, en 1956, de l'Afrique-Occidentale française. Dans ces fonctions, il doit faire face à la montée des revendications indépendantistes et gérer des situations parfois tendues, notamment en Guinée et au Sénégal. Il favorise la mise en place de réformes administratives et économiques visant à stabiliser ces territoires et à accompagner leur transition politique. Toutefois, son attachement à une présence française forte suscite des tensions avec certains leaders indépendantistes.

Son action vise à accompagner la décolonisation, bien qu'il demeure attaché à une vision forte de la présence française dans ces territoires. Il est notamment impliqué dans les négociations menant à l'indépendance de plusieurs pays africains au début des années 1960, cherchant à préserver les liens entre la France et ses anciennes colonies au sein de la Communauté française instituée par la Constitution de 1958.

En 1960, il est appelé au gouvernement par le général de Gaulle et devient ministre des Armées, fonction qu'il occupe jusqu'en 1969 sous les gouvernements Pompidou et Couve de Murville. À ce poste, il pilote la modernisation de l'armée française en supervisant la professionnalisation des forces armées, l'amélioration des équipements militaires et le renforcement des capacités opérationnelles. Il joue un rôle déterminant dans la mise en place de la force de dissuasion nucléaire française, concrétisant la volonté du général de Gaulle d'assurer l'indépendance stratégique de la France. Sous son mandat, la France réalise avec succès ses premiers essais nucléaires dans le Sahara en 1960, puis à Mururoa à partir de 1966. Sur cette question cruciale, il déclarera : "L'arme nucléaire n'est pas seulement une garantie de notre indépendance, elle est aussi un instrument de paix, car la force de dissuasion repose sur la certitude que son usage entraînerait des conséquences inacceptables pour l'adversaire."

Pierre Messmer veille également à la réorganisation des forces militaires françaises après la guerre d'Algérie, avec une rationalisation des effectifs et une réévaluation des priorités stratégiques en faveur de la défense du territoire national et de l'autonomie militaire. Il impulse la création de nouveaux programmes d'armement, notamment la modernisation de la force aérienne avec le Mirage IV et le développement des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE). Son rôle est crucial dans la stratégie militaire française de l'époque, consolidant la place de la France parmi les grandes puissances militaires mondiales.

Après une brève retraite de la politique, il revient en 1972 en tant que Premier ministre sous la présidence de Georges Pompidou. Lors de son arrivée à Matignon, il déclare : "Nous sommes ici pour servir l'État et non pour nous en servir." Confronté à une situation économique difficile marquée par le premier choc pétrolier de 1973, il met en place des mesures d'austérité budgétaire et cherche à moderniser l'administration publique en renforçant l'efficacité de l'État. Il engage également des réformes pour adapter l'économie française aux nouvelles réalités internationales, tout en poursuivant les grands projets d'infrastructure lancés sous de Gaulle et Pompidou, notamment dans les domaines du nucléaire civil et du développement des transports.

Son mandat est également marqué par des tensions sociales, notamment avec les syndicats et certains mouvements étudiants, qui contestent les restrictions budgétaires et les réformes gouvernementales. Fidèle à son tempérament gaulliste, il adopte une posture de fermeté face aux revendications sociales, tout en maintenant le cap sur ses objectifs de modernisation. Cependant, son action est brutalement interrompue en 1974 à la suite du décès de Pompidou, laissant place à une nouvelle ère politique avec l'élection de Valéry Giscard d'Estaing. À son départ de Matignon, il déclare avec lucidité : "L’histoire jugera ce que nous avons fait, mais j’ai la conscience tranquille d’avoir servi la France avec droiture et fidélité."

Après son départ de Matignon, Pierre Messmer choisit de s'éloigner du premier plan politique, tout en restant un acteur influent dans les cercles du pouvoir. Il siège à l'Assemblée nationale jusqu'en 1988, représentant la Moselle et continuant de défendre une vision gaulliste de l'État et de la politique étrangère. Il devient également membre du Conseil constitutionnel de 1986 à 1995, où il veille au respect des institutions et au bon fonctionnement des lois.

Parallèlement, il s'implique dans diverses institutions stratégiques, notamment au sein de la Fondation Charles de Gaulle et du Conseil supérieur de la réserve militaire, témoignant de son engagement indéfectible envers la souveraineté nationale.

Passionné par l'histoire et les lettres, il est élu à l'Académie française en 1999, occupant le fauteuil de Maurice Schumann. Cet honneur consacre une vie dédiée au service de l'État et à la transmission des valeurs républicaines. Il y contribue activement jusqu'à la fin de sa vie, participant aux débats intellectuels et publiant plusieurs ouvrages sur l'histoire militaire et politique de la France. Ce dernier engagement illustre son attachement aux valeurs culturelles et intellectuelles qui ont toujours guidé son action, renforçant son image d'homme d'État cultivé et visionnaire.

Pierre Messmer s'éteint le 29 août 2007 à l'âge de 86 ans. Son héritage politique demeure marqué par son engagement au service de la France, sa vision gaullienne de l'État et son action dans la construction de la politique de défense française. Homme de conviction et de devoir, il reste une figure emblématique du XXe siècle français.

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