Enjeux stratégiques et historiques des accords de défense avec les Etats-Unis
Alors que le Parlement de Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG) s'apprête à débattre des récents accords de coopération en matière de défense et de surveillance maritime avec les États-Unis, il est essentiel de comprendre le contexte historique et géopolitique qui a conduit à ces développements. Depuis son indépendance en 1975, PNG a navigué parmi diverses influences étrangères, cherchant à renforcer sa sécurité nationale tout en maintenant sa souveraineté.
La relation entre PNG et les États-Unis a évolué au fil des décennies, ancrée dans des accords militaires et une coopération stratégique. En mai 2023, PNG et les États-Unis ont signé un Accord de Coopération en matière de Défense (DCA) et un Accord sur les Activités Maritimes Transnationales Illicites. Ces accords visent à moderniser les infrastructures militaires de PNG, améliorer les capacités de ses forces de défense et renforcer la surveillance maritime pour lutter contre des activités telles que la pêche illégale et le trafic de drogue.
L’accord de défense signé en 2023 marque un tournant significatif, en particulier dans le contexte de la montée en puissance de la Chine dans le Pacifique Sud. La Papouasie-Nouvelle-Guinée, située stratégiquement près de routes maritimes cruciales, est devenue un terrain de jeu pour les grandes puissances cherchant à étendre leur influence. La Chine, par exemple, a considérablement intensifié ses relations diplomatiques et commerciales avec les nations insulaires du Pacifique, signant un pacte de sécurité avec les Îles Salomon en 2022, ce qui a suscité des préoccupations à Washington et Canberra.
Pour PNG, l'accord avec les États-Unis est perçu comme une opportunité de renforcer sa défense tout en se préparant à des menaces potentielles. Le Premier ministre James Marape a déclaré que l'accord était "mutuellement bénéfique" et essentiel pour la sécurité nationale de PNG, promettant qu'il n'empiéterait pas sur la souveraineté du pays. Malgré cela, l'accord a suscité des critiques internes, notamment de la part du Congrès des syndicats de PNG, qui a exprimé des préoccupations concernant la transparence et le manque de consultation publique.
Historiquement, la défense et la sécurité de PNG ont été marquées par des périodes de turbulence et de restructuration. Après la crise de Bougainville (1988-1998), les forces de défense de PNG (PNGDF) ont subi une baisse de moral et de capacités. Divers gouvernements ont tenté de moderniser et de renforcer la PNGDF, notamment à travers des accords de coopération avec des pays comme l'Australie et l'Indonésie. Cependant, les défis économiques ont souvent entravé ces efforts, limitant les dépenses de défense à environ 2 % des dépenses gouvernementales.
L'accord de défense avec les États-Unis comprend un programme de fourniture d'équipements de protection individuelle pour les forces de défense de PNG, y compris des casques balistiques et des gilets pare-balles. En outre, le programme "shiprider" permettra aux personnels de PNG de travailler à bord des navires de la Garde côtière américaine et vice versa, renforçant ainsi la surveillance et la gouvernance maritimes dans la région.
Alors que les débats parlementaires approchent, il est clair que ces accords s'inscrivent dans un cadre plus large de rivalités géopolitiques dans le Pacifique. Les États-Unis cherchent à contrer l'influence croissante de la Chine, tandis que PNG tente de naviguer entre les deux puissances pour maximiser ses bénéfices en termes de sécurité et de développement économique.
Une nouvelle ère pour la Papouasie-Nouvelle-Guinée
Le projet de loi actuellement en débat au Parlement de Papouasie-Nouvelle-Guinée concerne deux accords majeurs récemment signés avec les États-Unis : un Accord de Coopération en matière de Défense (DCA) et un Accord sur les Activités Maritimes Transnationales Illicites. Ces accords visent à renforcer les capacités de défense de la Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG) et à améliorer la sécurité maritime dans la région.
Le DCA signé en mai 2023, représente une avancée significative dans les relations de défense entre les deux nations. Il prévoit la modernisation des infrastructures militaires de PNG, notamment par la construction et l’amélioration de bases militaires, et l’augmentation des formations et des exercices conjoints entre les forces armées des deux pays. L'accord permet également aux forces américaines un accès élargi aux installations militaires de PNG, une mesure qui a suscité des débats intenses dans le pays. L'objectif principal de cet accord est d'améliorer la capacité de la PNGDF à répondre aux menaces sécuritaires et aux catastrophes naturelles.
En complément du DCA, l'accord sur les activités maritimes transnationales illicites, souvent appelé accord "shiprider", est conçu pour lutter contre les activités maritimes illégales telles que la pêche illégale, le trafic de drogue et autres activités illicites dans les eaux de PNG. Ce programme permet aux personnels de PNG de travailler à bord des navires de la Garde côtière américaine et vice versa, facilitant ainsi une coopération étroite et un partage d’informations crucial pour la surveillance maritime.
L'accord prévoit également des apports significatifs en équipement militaire. En particulier, les États-Unis se sont engagés à fournir 12,4 millions de dollars d'équipements de protection individuelle aux forces de défense de PNG, incluant des casques balistiques et des gilets pare-balles. Cet investissement vise à renforcer la sécurité des forces de PNG et à améliorer leur capacité opérationnelle.
Cependant, ces accords ne sont pas sans controverse. Des critiques au sein de PNG, notamment du Congrès des syndicats de PNG, ont exprimé des inquiétudes concernant la transparence des négociations et le manque de consultation publique. Des questions ont été soulevées sur la souveraineté de PNG et la possibilité que l'accord permette une présence militaire étrangère excessive.
Elias Wohengu, secrétaire du Département des Affaires étrangères de PNG, a tenté de dissiper ces préoccupations en affirmant que l'accord ne prévoit aucune immunité pour le personnel militaire étranger et n'exige pas de modifications des lois nationales. Il a insisté sur le fait que tout crime commis par des personnels étrangers serait puni selon les lois de PNG, et que les rumeurs sur une immunité accordée aux militaires américains étaient infondées.
Ces accords s'inscrivent dans un contexte de rivalités géopolitiques croissantes dans le Pacifique Sud, avec la Chine cherchant à accroître son influence dans la région par le biais de partenariats stratégiques et économiques. Les États-Unis, en réponse, intensifient leurs engagements avec les nations insulaires du Pacifique, notamment PNG, pour contrer l’influence chinoise.
Les accords de coopération en matière de défense et de surveillance maritime entre la Papouasie-Nouvelle-Guinée et les États-Unis marquent un tournant dans les relations bilatérales et la stratégie de sécurité de PNG. Ils promettent de renforcer les capacités de défense de PNG tout en soulevant des questions cruciales sur la souveraineté et la transparence des processus décisionnels.
Points de vue divergents au parlement
Alors que les accords de défense et de surveillance maritime récemment signés entre la Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG) et les États-Unis sont sur le point d'être débattus au Parlement, les opinions divergent fortement parmi les différents partis politiques. Les accords, visant à renforcer les capacités de défense de PNG et à améliorer la sécurité maritime, sont salués par certains comme un moyen de protéger la souveraineté du pays, tandis que d'autres craignent une ingérence étrangère excessive.
Le Premier ministre James Marape et son gouvernement soutiennent fermement ces accords, affirmant qu'ils sont essentiels pour la sécurité nationale de PNG. Marape a souligné que les accords étaient "mutuellement bénéfiques" et aideraient PNG à développer une économie robuste tout en sécurisant ses intérêts nationaux. Il a également insisté sur le fait que ces accords n'empiéteraient pas sur la souveraineté du pays et qu'ils avaient été négociés de manière transparente et légale.
Toutefois, ces assurances n'ont pas suffi à apaiser les critiques. L'opposition parlementaire et certains groupes de la société civile ont exprimé des préoccupations majeures. Les critiques les plus virulentes proviennent du Congrès des syndicats de PNG, qui a dénoncé le manque de consultation publique et la rapidité des négociations. Ils craignent que l'accord ne soit trop accommodant pour les intérêts américains et pourrait potentiellement compromettre la souveraineté de PNG.
Dans un discours passionné, Anton Sekum, secrétaire général par intérim du Congrès des syndicats, a déclaré que tout accord qui pourrait empiéter sur la souveraineté ou mettre le pays en danger ne doit pas être conclu sans le consentement de tous les citoyens. Cette position est partagée par plusieurs membres de l'opposition, qui demandent une plus grande transparence et un débat parlementaire approfondi avant toute ratification.
Les étudiants des principales universités de PNG ont également protesté contre ces accords. Des manifestations ont eu lieu à l'Université de Papouasie-Nouvelle-Guinée, à l'Université de Goroka et à l'Université de Technologie de Lae, où les étudiants ont appelé à une meilleure explication des termes de l'accord et à un débat public avant la signature officielle. Kenzie Walipi, président des étudiants à l'Université de Technologie de Lae, a déclaré que si un tel accord va affecter les citoyens de quelque manière que ce soit, ils doivent en être informés.
Elias Wohengu, secrétaire du Département des Affaires étrangères de PNG, a tenté de rassurer les critiques en affirmant qu'aucune immunité ne serait accordée aux militaires étrangers et que l'accord n'exigerait pas de modification des lois nationales. Il a insisté sur le fait que tout crime commis par des personnels étrangers serait puni selon les lois de PNG.
Bien que les accords de coopération en matière de défense et de surveillance maritime avec les États-Unis soient considérés par le gouvernement de PNG comme une avancée stratégique, ils divisent profondément le Parlement et la société civile. Les débats à venir s'annoncent houleux et cruciaux pour l'avenir de la politique de sécurité de PNG.
Ce qu'en pensent les habitants
L'opinion publique en Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG) est profondément divisée concernant les récents accords de défense et de surveillance maritime signés avec les États-Unis. Ces accords, conçus pour renforcer la sécurité nationale et la surveillance maritime, ont suscité des réactions variées parmi les citoyens, les groupes civiques et les organisations de la société civile.
De nombreux citoyens voient ces accords comme une opportunité de renforcer la sécurité nationale et de bénéficier du soutien logistique et financier des États-Unis. Les partisans de l'accord estiment que la coopération avec une puissance militaire majeure peut aider à moderniser les capacités de défense de PNG et à mieux protéger ses eaux territoriales contre les activités illégales telles que la pêche non réglementée et le trafic de drogue. Selon certains sondages, une proportion significative de la population, notamment dans les zones urbaines, soutient ces initiatives, espérant qu'elles mèneront à une amélioration des infrastructures et des opportunités économiques.
Cependant, cette perspective positive est loin d'être universelle. Une partie importante de la population, notamment les étudiants et les syndicats, exprime des préoccupations quant à la souveraineté nationale et à la transparence des négociations. Des manifestations ont eu lieu dans plusieurs universités, où les étudiants ont demandé davantage de clarté sur les termes des accords et une consultation publique plus approfondie avant leur mise en œuvre. Kenzie Walipi, président des étudiants à l'Université de Technologie de Lae, a souligné la nécessité d'informer pleinement les citoyens sur les implications de ces accords.
Les critiques se concentrent également sur la rapidité des négociations et le manque de consultation publique. Le Congrès des syndicats de PNG a exprimé ses inquiétudes concernant l'influence potentielle des États-Unis sur la politique intérieure de PNG et a appelé à un débat parlementaire exhaustif avant la ratification des accords. Anton Sekum, secrétaire général par intérim du Congrès des syndicats, a affirmé que tout accord susceptible de compromettre la souveraineté de PNG ne devrait pas être signé sans le consentement des citoyens.
En outre, certaines rumeurs ont circulé selon lesquelles l'accord pourrait accorder une immunité aux militaires américains en cas de crimes commis sur le sol papou-néo-guinéen. Le gouvernement a tenté de dissiper ces inquiétudes, avec Elias Wohengu, secrétaire du Département des Affaires étrangères, affirmant qu'il n'y aurait aucune immunité et que les lois nationales continueraient de s'appliquer.
Malgré les assurances du gouvernement, le débat public reste intense, et l'issue des discussions parlementaires à venir sera cruciale pour l'avenir de la politique de défense de PNG. Les accords sont perçus par certains comme une étape nécessaire pour la sécurité nationale et le développement économique, tandis que d'autres craignent une perte de contrôle souverain et une ingérence étrangère accrue.